Jeudi dernier, évaluation pour les 6e4.
Lorsque je décide d’une évaluation, ils sont avertis une semaine à l’avance, savent précisément le sujet évalué et donc le cours à réviser. Pas de piège donc. Des questions, certaines sur le vocabulaire, d’autres plus intelligentes, mais pas trop, et deux points pour la présentation et l’orthographe.
La salle est vaste, les tables nombreuses, donc un élève par table, et pas de tentation de copier.
Les questions sont notées au tableau par un élève, puis les consignes étant données, silence total et vingt minutes de temps imparti, et je donne le top-départ.
Et donc, jeudi dernier, j’ai chiné, nonchalamment, de copies en torchons.
Une bonne partie des 6e4 a visiblement très bien révisé. Certains ont même préparé leur copie la veille avec leur nom et prénom bien sûr, mais ont de plus tracé un joli cadre pour mon commentaire, dans lequel une zone est réservée à la note, sur 20, c’est déjà écrit, et je n’aurai plus qu’à noter le numérateur sur leur jolie fraction. Ils me mâchent le travail, qu’ils sont trognons.
Si certains sont déjà très impliqués dans la rédaction des réponses, d’autres, dont Bourzig, semblent songeurs.
Je m’approche et découvre qu’après cinq minutes, l’espace entre les questions est désespérément vide. Je fais part de mon émoi à Bourzig.
— Tu as révisé Bourzig ??
— Ben oui, j’ai bien révisé hier soir…
Seulement voilà, c’était hier soir. Depuis, de longues heures se sont écoulées, sur l’échelle de Bourzig, un siècle, et donc ce matin, y reste pus rien.
C’est pas d’bol quand même, c’est vrai, tu révises comme un malade, tu fais rentrer dans ta tête plein de choses, en poussant bien en plus, et tu fermes bien la porte, en pensant que tu les retrouveras le lendemain, et donc, tu vas te coucher tranquille, pépère, confiant quoi. Et là, au p’tit dèj, tu te rends compte que toutes les choses que t’avais dans ta tête, et ben elles ont scié les barreaux pendant la nuit, et hop, elles se sont évadées. Mais va expliquer ça à un prof sans passer pour un gros fumiste. Franchement, ça finit par être décourageant. Et donc, comme tu sais pas où elles se sont évadées, ben tu fais une enquête, et tu prends l’air de réfléchir, en plissant bien les paupières, et tu prends ton stylo, et tu tapotes doucement tes lèvres pour bien faire voir au prof que tu réfléchis à fond, que tu prends cette affaire très au sérieux, que t’es vraiment au taquet au niveau de la réflexion. Mais bon, tu dois te rendre à l’évidence, les choses que t’as apprises, elles ont dû quitter la ville, pasque dis donc, y’a plus de traces.
Alors le prof, y te taquine un peu, comme s’il te croyait pas trop, ce qui est assez vexant en fin de compte et tu te demandes pourquoi y va pas faire chier un peu les autres, ça te ferait des vacances. Et enfin, au bout d’un moment, il s’éloigne avec son air de rigoler et il va voir Brizouille.
Ouf.
Brizouille, c’est complètement différend.
D’abord Brizouille, il est vachement sérieux, il ne cesse d’écrire, et s’interrompt à peine deux secondes pour me regarder. Mais de suite, il se remet au boulot. Je suis un peu surpris mais bon, un accident étant toujours possible, je lis par-dessus son épaule. Et là, en lisant, tu vois bien qu’y a pas eu d’évasion pendant la nuit, mais plutôt comme une espèce de mutinerie, et du coup, c’est un sacré bordel.
Déjà, pour Brizouille, les questions de l’évaluation, c’est purement anecdotique. Bon, ça donne des pistes, c’est vrai, mais globalement, on s’en fout un peu quoi. L’important c’est de faire savoir au prof que tu sais des choses, qui n’ont rien à voir avec le sujet, certes, que t’as pas forcément apprises en cours de techno, mais bon, y’a d’autres sources pour s’informer en même temps, alors faites pas chier s’il vous plaît.
Et comme tu te souviens d’un truc ou deux du cours précédent, mais vraiment par hasard, le coup de bol quoi, tu les mélanges bien avec des trucs qu’ont rien à voir. Et pour ça, fais pas ton modeste, n’hésite pas à employer les grands moyens, tu prends un bon gros mixeur, tu règles sur « mayonnaise », et tu fais mouliner le truc pendant dix minutes, et après ça, tu tartines bien comme y faut, pense à bien étaler sur les bords, avec un rouleau si t’en as, et y’a plus qu’à espérer que le prof s’y retrouve. Tu me diras, en même temps, il a qu’ça à foutre, mais avec un peu de chance, t’as réussi à l’embrouiller.
Mais comme t’es pas trop sûr que ça marche, soignes bien la présentation de la copie, le fignolage quoi, la p’tite finition qui fait la différence, le p’tit coup de polish quoi, comme ça, t’es sûr d’avoir au moins un point sur vingt, ben ouais, pas de petit profit. Une petite astuce : pense à bien souligner les mots qui n’ont aucun intérêt, pasque graphiquement, ça fait toujours son p’tit effet. Mieux, un double trait pour souligner, ça, ça pète bien, mais le deuxième trait, pas trop parallèle si possible, voilà, comme ça c’est bien, merci.
Et comme t’as quand même tartiné la moitié du verso avec la mayo, si le prof est sympa, t’auras peut-être un point de plus, ça paiera toujours l’encre quoi.
Seulement voilà, à la dernière question, t’es vachement emmerdé, pasque t’hésites entre deux réponses.
Mais bon, t’hésites pas longtemps, pasque là, t’as la méga illumination. Et là, si c’est pas d’la super combine ça, surtout tu t’emmerdes pas, tu mets les deux, comme ça, le prof, ça lui fera comme un p’tit QCM, il aura plus qu’à cocher la bonne réponse et zou, par ici les jolis points !! Et oh, après tout, à lui de prendre ses responsabilités, c’est vrai quoi, c’est lui qu’a commencé.
Pour finir, j’aurais bien voulu vous parler de l’élève Trapugne, mais celui-ci présente une pathologie très particulière. En effet, chaque fois qu’un contrôle est annoncé, il fait comme une espèce de petite grippe au niveau du cerveau, mais pas seulement, au niveau des jambes aussi, et du coup, y reste au lit.
Donc jeudi dernier, il a dû faire une rechute.
Et Kimberly Patouillard ? Elle a fait quoi Kimberly Patouillard ?
Bien, souvenir douloureux d’EMT de 3ème.
Contrôle rapide sur les définition des unités d’énergie, d’élec ect.
Tout d’un coup, gros blanc sur le Joule.
Comme je me la pétais trop en 3ème, (félicitations du conseil de classe, on peut), j’ai juste mis » le Joule est l’unité de je ne sais pas encore quelle mesure, mais je finirai bien par le savoir un jour. »
L’enseignante, me rappelle très bien de son nom, de ses brûnes à l’interclasse et de ses grosses lunettes rondes, montre ma copie à tout le monde et dit « Celle-là, je la garde pour la fin, c’est la meilleure ».
J’avais pris 18. La meilleure note.
Avec un petit mot à la fin:
« Tu te prends pour qui? Si tu avais étudié ton cours, tu l’aurais su, tu fais signer à ton papa que je connais qu’il était avec moi à la fac ».
J’ai pris 2 baffes.
Des bizettes, ça le valait bien.
Excellent ! J’ai l’impression de voir les miens !
Ils grandissent…
… et rien ne change !
Quoique… si :
— Quand ils grandissent, ils ne fignolent plus autant la présentation : adieu les traits (même pour un tableau, où est passée cette fichue règle ?) et même adieu les marges !
— Quand ils grandissent ils assument beaucoup mieux de ne pas avoir de mémoire, et prétendent autoritairement que « Votre question n’était pas claire, M’dame »… aaaaah ben ça doit être ça… que n’y avais-je point pensé ? Chuis nulle… c’est ma faute, mea culpa !
Je lis (presque ! Vive le RSS !) tous vos messages, et à chaque fois, je m’éclate ! Merci !
j’ triche pas, je délpoie l’étendue de mes capacités reflexives …
Mais alors tu n’as même pas de bons gros fraudeurs, le resquilleur, celui qui a tout ecrit dans la paume de ses mains et qui voit disparaitre les réponses à chaque poussée de stress et de sueure, le papier roulé dans le stick de colle, le travail microscopique de reproduction d’un cours de 8 pages au dos d’un doubledécimètre titeuf …
ou alors c’est qui sont vraiment bon les 6ème4 et qu’ils se font pas gauler …. même pas une tentative désespérée d’écarter avec son gros oreil, la couverture du cahier qu’on a rangé en évidence dans son sac à ses pieds …? même pas un traditionnel » M’sieur mon effaceur y marche plus, j’peux demander celui de Kévin … et la réponse du numéro 2 ?! » … ils sont forts …
Meli Melo, ah bon ?! En 3ème y font pu ???
Bah dis donc Charly t’as du bol, parce que avant non plus y font pas encore. CE2, CM2, CM2, y font pas de tableaux, ou si avec des colonnes larges de 1 carreau, et pour écrire dedans, c’est pas l’top… ou bien encore avec des lignes en escalier… t’imagine ? non ? ouais je sais c’est difficile à se représenter…
En conclusion, profites-en tu m’as l’air de les avoir au bon moment question présentation…
C’est tellement ça!
On s’y croirait… Moi aussi, j’ai l’impression de les avoir eus en face de moi!
Bravo
On s’y croirait vraiment …
le hic c’est que les miens sont au lycée …
et qu’ils essaient de tricher même après la remise des premiers DS … où en leur rendant leurs copies je leur ai dit : « bande de rigolos, avant de loucher sur la copie de votre voisin, assurez-vous qu’il a le même sujet que vous ». Là, la classe hilare, et moi avec …. sauf …. ceux qui sont concernés ….
Et le pire, c’est qu’à chaque devoir, y’en a qui recommence !!!
ça s’appelle le comique de répétition ! Comme quoi en physique, on fait même du français !!
On s’y croirait !
J’ai eu des collègues de classe qui étaient comme ça. Moi? Jamais. J’étais (et suis encore) bien trop sérieux ^^
Un beau cours de sciences appliquées.
Ah moi j’étais comme Bourzig, mais depuis que j’ai lu Pennac je me sens moins seule, lui aussi avait cette faculté d’effacer la totalité de la leçon apprise pendant la nuit !
Ragh ça aurait été bien que tu nous fasses (fisses ?) toute la classe !
Et les filles ? Tu ne parles pas des filles ? Qui s’écroulent en larmes en découvrant le sujet, celles qui râlent parce qu’elles se cassent leur parfaite french manucure en écrivant les réponses … celles qui prennent une pose mi Channel mi D&G en regardant Paulo parce que draguer en contrôle, ça le fait aussi … Pfiuu il devrait exister des congrès pour réunir toutes nos anecdotes !
Tu es génial Charly, toujours un bonheur de te lire !
Bourzig est attachant; je l’imagine plus grand que ses camarades, maigre, le cheveu ras, le visage aux traits peu symétriques et déjà un peu « adultes »…?
J’ai comme une affection pour Brizouille…
J’ai souvent brizouillé en géo avec délectation, et ma foi, j ai eu quelquefois la moyenne..
pas souvent faut dire..
je n’ ai jamais écrit qu’en 1515, Paris était la capitale de l’Espagne, c’est dire que j’arrivais à rester cantonnée dans le coin Géo de mon cerveau, c’était déjà un exploit!!!
Comme ils sont mignons…
Ben moi ça me fait pas rire du tout!
J’en ai même une grosse boule au fond de la gorge tellement je m’y crois !
Tu n’as pas celui qui prend ton cours pour un cours d’Art Plastique ? Genre, tout ce que t’as appris s’est tellement évadé que t’en es réduis à repeindre la copie, et voilà que tu fais des jolies vaguelettes bleues roses et jaunes, et que tu mets « Histoire » en police 43 bien en haut de la copie.
Epreuve de géographie, oral du bac version 1967.
Sujet pioché : « le Canada »
Et là, le trou complet. Me restait comme seul souvenir que le Canada s’était là-haut à gauche, au-dessus des Etats-Unis.
J’ai parlé pendant 10 bonnes minutes sans m’arrêter devant un prof à moitié endormi -je devais être la 20e candidate de la matinée. Aucune idée de ce que j’ai pu raconter.
A la fin il m’ a dit : « Z’avez fini votre char? »….
et il m’a mis 13.
Laquelle note m’avait quand même permis d’avoir une petite mention au bac, avec 12,01 de moyenne,lol.
Comme quoi, raconter n’importe quoi, ça peut rapporter quand même.
Entre le Prison Break made in techno, le sandwich mayonnaise zébré de soulignements et les QCM (Que Caser, Marde ?!), les 6e4 partent avec un excellent bagage ! Ils finiront tous hommes (et femmes ^^) politiques: parler pour ne rien dire sur un sujet qu’ils ne connaissent absolument pas, en enrobant bien le tout pour cacher le truc, et en réclamant éventuellement une dispense maladie de dernière minute… (angine blanche, quand tu nous tiens !)
Brizouille président !
A chaque fois que je lis tes billets, j’ai une goutte d’eau bien fraîche qui me frise la colonne vertébrale… Je repense à tous ces moments où il me semblait donner le change, pensant que le prof n’y verrait que du feu. Bon sang la technique du tapotage de stylo sur la lèvre, les yeux au dessus de la ligne bleue des vosges, que t’as l’air de fondre un neurone à la s’conde tellement t’es concentrée, c’était la mienne !!! Et je l’utilise encore avec Môssieur le Boss poilu ! Et là tu voudrais me faire croire que depuis tout ce temps on voit clair dans mon jeu ?! Hein ? Hein ? Hein ?
Pffff… Bin me v’la toute chose Charly !
Et ces 3 là viennent passer une à deux fois une demi-heure dans mon cabinet d’orthophonie. T’imagines ? Chez moi ils sont TOUS comme ça… En même temps je m’en fous, je fais pas d’interros, alors.
Hé, bon aniv’ !
Et ben c’ était juste pour souhaiter un bon aniv’ au blog qui existe depuis maintenant un an… Et quelques jours de retard.
Félicitation au papa Charly.
A plus
Les cancres du XXIème siècle et Charly en Prévert, qui fait de la prose sans en avoir l’air.
Tu m’ as remué les tripes Charly. J’ ai connu tout ce que tu viens de décrire à la perfection. Rien ne manque et j’ étais de bonne foi. J’ étais une enfant inhibée, solitaire, mes capacités moyennes mais je me faisais un point d’ honneur à tout bien apprendre par cœur, exception faite de l’ histoire que je n’ ai jamais pu encadrer.
Que de maux de ventre en contrôle, de spasmes intestinaux à me tordre sur ma chaise, de migraines pour n’ avoir pas su répondre alors que je savais quelques heures plus tôt et qu’ au moment de livrer la leçon, pfiou, plus rien, le néant. Quelle angoisse! Surtout que de mon temps les 20 n’ existaient pas (18 au mieux) et les 0 pleuvaient avec 5 fautes d’ ortografe seulement!
Enfin un prof qui comprend tout ça, sauf que pour moi c’ est trop tard!
Bizous Charly tu as exorcisé mes démons scolaires!
C’est ma fêteuh…
La grande évasion… Moi c’est plutôt du genre parasite… Hmm, la vieille feinte. Le cours d’anglais qui revient provoquer une diarrhée mentale honteuse en devoir d’espagnol, ou le cours de maths qui n’a rien à foutre strictement en techno’. Même si, pour tout avouer, je n’en ai jamais eu besoin, il suffisait de m’approcher d’un pc pour qu’il se mette en mode « Fatal error » (j’le touchais même pas), et que je touche une perceuse pour que la mèche explose (même qu’une fois j’ai fait un trou de 3 cm de diamètre avec un diamètre de 0.5 mm de pointe, et même me suis déjà retrouvée avec le circuit imprimé en pleine fusion avec la mèche)… Bon soit. Enfin bref.
Sont mignons vos n’élèves, m’sieur =}.
En passant …
Toujours un plaisir de venir par içi !! sourire assurément affiché !! Mine de rien , ils sont attachants ces gamins !!!
ben il était là Bourzig?
eh ! monsieur
c ‘était dur les liaisons si vous croyez que je vais regarder mon frigo autrement !
Il faudrait que cela me passionne la liaison pivot pour ouvrir le frigo moi je péfère l’ ouvrir et le dévaliser !
bourzig bis